On aime bien l’UFC Que Choisir (à ne pas confondre avec l’UFC - Ultimate Fighting Championship, pas exactement le même registre). Il est ainsi toujours délicat d’évoquer une affaire dans laquelle le comportement de l’Association ne semble pas en adéquation avec ses valeurs. Cependant, un récent jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Paris la concernant a donné une illustration intéressante des situations justifiant le recours à une expertise pour risque grave. Un exemple qui vaut qu’on s’y attarde quelques instants.
L’article L. 2315-94 du Code du travail permet au CSE de faire appel à un expert habilité lorsqu'un risque grave, identifié et actuel est constaté dans l'établissement. Pour certaines situations, cela peut sembler évident : l’expertise sera difficile à contester après un accident grave, ou lorsque les salariés sont confrontés à des substances nocives sur leurs postes de travail.
En revanche, les risques psychosociaux constituent toujours un sujet délicat. Comment caractériser un risque affectant le psychisme des salariés, et dont l’employeur sera tenté de rattacher l’origine à leur vie privée (« s’il a fait un burn-out, c’est parce que sa femme l’a quitté, pas parce qu’il quitte l’entreprise tous les soirs à 22 heures. Il devrait d’ailleurs s’interroger… »). Si un accident physique peut être facilement rattaché à un évènement survenu sur le lieu de travail, un risque psychosocial peut avoir de multiples causes, tant extérieures que directement liées à l’entreprise. C’est le problème des risques psychosociaux : leurs manifestions sont dramatiques, mais les relier au travail est souvent une gageure.
L’expertise est un outil réellement utile pour le CSE, puisqu’elle peut permettre d’effectuer une analyse rigoureuse et méthodique des conditions de travail, par un professionnel habilité. Néanmoins, pour y recourir, le Comité doit justifier l’existence d’éléments objectifs caractérisant un risque grave. En matière de RPS, les éléments portent généralement sur les taux d’absentéisme et de turn-over.
L’affaire agitant l’UFC Que Choisir nous donne une illustration des autres éléments permettant de prouver l’existence d’un risque psycho-social.
Souvent, pour mettre en avant l’ambiance délétère régnant dans un service, les élus peuvent se référer à deux indices : l’absentéisme au sein du service, et son turn-over.
Dans l’affaire en question, les difficultés concernaient un service comptant environ vingt-cinq personnes. L’absentéisme n’y était pas significatif selon le Tribunal judiciaire. En revanche, le turn-over était lui globalement préoccupant, le taux de départ au sein du service atteignant certaines années jusqu’à 25%, et même 43% de l’effectif.
Ces deux seuls critères, même pris en ensemble, ne suffisait pas à justifier le recours à une expertise. Cependant, le CSE avait d’autres éléments dans son dossier qui lui ont permis de convaincre le juge de la nécessité d’agir :
Ainsi, l’ensemble de ces éléments montraient de manière cohérente et convergente l’existence d’un risque pour la santé et la sécurité des salariés, ce qui justifiait le recours à une expertise.
Note pour les CSE donc : une demande d’expertise se prépare en amont. Rassembler des éléments écrits, notamment des témoignages et des emails, permet de constituer un dossier attestant de l’existence d’un risque grave pour les salariés.
Vous pouvez nous joindre au 01 87 66 96 92
sur notre adresse email contact@komite-avocats.fr
ou en remplissant le formulaire ci-dessous