Plusieurs journaux en avaient fait leur choux gras : il serait désormais possible d’appeler un commissaire de justice (le nouveau nom des huissiers) pour prélever directement une dette sur la rémunération d’un salarié. Certains y voyaient même la solution miracle pour les propriétaires en conflit avec leurs locataires. Qu’est-il réellement, doit-on avoir peur de ceux qui menacent d’envoyer l’huissier chez votre patron ?
Note pour les profanes, les huissiers ont disparu, même si le terme est resté dans le langage courant. On parle désormais de commissaire de justice, fruit d’un croisement de laboratoire entre un commissaire-priseur et un huissier. Le commissaire de justice remplace ces deux professions, et dispose notamment des prérogatives des anciens huissiers. Le terme commissaire a-t-il été conservé parce qu’il était plus classieux ou moins connoté que celui d’huissier ? Personne ne le sait. Toujours est-il, si on vous menace de vous envoyer un huissier, vous pouvez souhaitez bonne chance à la personne pour en trouver encore un.
L’huissier, ça fait peur, surtout quand on menace de l’envoyer chez vous. Qui n’a jamais entendu cette menace, venant de son propriétaire, d’un artisan indélicat, d’un professionnel peu scrupuleux, parfois même des membres de sa famille (un élu de CSE nous a même raconté avoir reçu une telle menace d’un salarié qui n’avait pas eu ses chèques cadeaux de Noël…).
En réalité, le commissaire de justice ne peut qu’exécuter une décision de justice constatant une dette. Son rôle est de faire appliquer les jugements exécutoires, c’est-à-dire soit devenus définitifs (après que toutes les voies de recours ont été épuisées ou abandonnées), soit bénéficiant de l’exécution provisoire.
Il ne peut ainsi procéder à des saisies sur la seule demande d’un créancier. Par exemple, pour pouvoir récupérer des loyers impayés, le commissaire de justice ne peut qu’appliquer un jugement constatant l’existence d’une créance du locataire.
Lorsque l’on reçoit une menace de se faire envoyer un commissaire de justice, ne jamais oublier de demander le jugement qui va être exécuté ! Seul un juge peut vous contraindre à verser de l’argent à quelqu’un (du moins, légalement).
Lorsqu’un créancier a réussi à obtenir un jugement en sa faveur, il doit saisir un commissaire de justice. Le commissaire peut traditionnellement contacter la banque du débiteur pour saisir les sommes, ou faire saisir les biens.
Pour la saisie des rémunérations, le commissaire adresse dans un premier temps un commandement de payer au salarié de rembourser la somme due, de trouver un accord, ou de contester la saisie. En l’absence de réponse, le commissaire doit demander au créancier si celui-ci confirme poursuivre la procédure. Si c’est le cas, le commissaire transmet un procès-verbal de saisie à l’employeur. Celui-ci versera alors les sommes au commissaire, qui les transmettra au créancier.
Cependant, la saisie directe est encadrée. L’employeur doit respecter un barème, qui limite la part du salaire pouvant être saisie. Ce barème définit une fraction saisissable en fonction des revenus et des charges du salarié. Il s’agit d’une portion déterminée par l’article R. 3252-2 du Code du travail, qui a pour objet de s’assurer qu’un salarié bénéficie du minimum pour vivre à la fin du mois. En tout état de cause, l’employeur doit au minimum laisser chaque mois au salarié le montant du RSA.
L’existence d’une dette doit toujours être constatée par un juge. Cependant, il n’est plus nécessaire de saisir un juge de l’exécution pour faire exécuter une condamnation, ce rôle étant confié aux commissaires de justice. Une fonction spécifique de commissaire « répartiteur » est créée, la saisie devra être effectuer par les commissaires de justice disposant d’une formation dédiée à la saisie sur salaires (les sessions de formation risquent de valoir le détour). Ils devront notamment vérifier le calcul des montants saisissables, et organiser la répartition des sommes saisies entre les créanciers s’il y en a plusieurs. Ce sont ces commissaires répartiteurs qui se chargeront des saisies. En outre, un registre national de saisies des rémunérations est créé à des fins statistiques.
Pas de panique, le juge reste le seul à pouvoir dire qui doit de l’argent à qui.
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