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CSE : Comment rendre un avis à propos du reclassement d’un salarié inapte ?

Lorsque le CSE est consulté sur le cas d’un salarié déclaré inapte, la réunion est l’occasion pour les élus de contrôler le sérieux des recherches de reclassement, mais également les solutions qui n’auraient pas été explorées par l’employeur. Surtout, si la procédure de consultation est bâclée par l’employeur, celui-ci court le risque de voir le licenciement invalidé. Une conséquence à rappeler lorsque l’employeur vous répète pour la énième fois que l’avis du comité n’est que consultatif.

Quand le CSE doit-il être consulté ?

Prévue par l’article L.1226-2 du Code du travail impose à l’employeur de proposer à un salarié déclaré inapte un autre emploi approprié à ses capacités. Ce même article prévoit que les propositions de reclassement doivent prendre en compte l’avis du CSE.

Pour bien comprendre le rôle du CSE, il faut partir du point de départ : l’avis d’inaptitude. Celui-ci est un constat médical, le médecin du travail constatant l’incapacité du salarié à occuper son emploi.

Deux cas de figures peuvent survenir :

  1. Le médecin considère qu’aucun reclassement n’est possible, une situation pouvant concerner les cas où le salarié est devenu invalide, mais aussi fréquente pour les cas de burn-out, sortir le salarié de l’entreprise étant parfois préférable.
  2. Le médecin considère que le salarié peut être reclasser sur un autre emploi. Cas fréquent : le salarié travaillait en atelier, s’est blessé, mais pourrait travailler dans les bureaux.

Le reclassement intervient dans ce second cas de figure.

Lorsque le CSE est consulté, l’avis d’inaptitude est lui-même n’est pas remis en cause. En effet, il s’agit d’un avis médical, et ni l’employeur ni le CSE ne disposent des compétences pour analyser le diagnostic du médecin du travail (sauf peut-être dans les comités de cliniques ou autres établissements de santé). Ce sur quoi doit les élus doivent se prononcer est le sérieux des recherches de reclassement.

Concrètement, la consultation ne porte pas tant sur les raisons de l’inaptitude du collègue concerné (quoique le sujet puisse être abordé si l’inaptitude est d’origine professionnelle), mais sur les efforts de l’employeur pour maintenir le salarié dans l’emploi.

Comprendre l’étendue des recherches de reclassement en trois minutes

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions.

Ainsi, lorsqu’un salarié a été déclaré inapte, il appartient à l’employeur de :

- Rechercher les postes de reclassement disponibles en son sein et au sein du groupe auquel la société appartient ;

- Solliciter l’avis du CSE sur les postes de reclassement identifiés ;

- Prendre en compte les recommandations du médecin du travail ;

- Si possible, proposer au salarié au moins un emploi aussi comparable que possible à l'emploi qu’il occupait précédemment.

Le problème est que le Code du travail prévoit désormais que l'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé au moins un emploi, prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail. Avant, l’employeur devrait vraiment justifier avoir épluché tous les besoins de chacun de ses services, désormais, proposer un poste conforme aux exigences du Code du travail est suffisant.

La démarche n’est cependant pas si simple pour l’employeur, qui doit quand même justifier avoir effectué loyalement ses recherches de reclassement. Notons tout de même que, pour ce faire, l’employeur peut adresser à l’ensemble du groupe une lettre de demande de recherche de reclassement comportant le nom du salarié, sa classification et la nature de son emploi (Cass. Soc., 22 oct. 2014, n°13-20.403).

A noter également, l’obligation de reclassement doit concerner des postes aussi comparables que possible à l’emploi précédemment occupé par le salarié. L’employeur n’est tenu de proposer des postes de catégorie inférieure, ou supérieure, uniquement si le salarié dispose des compétences professionnelles nécessaires pour les occuper immédiatement, ou à brève échéance, au besoin en bénéficiant d’une adaptation au poste ou d’une formation courte.

Qu’est-ce qu’un CSE peut (doit) demander à l’employeur ?

Le CSE doit pouvoir vérifier si les recherches de reclassements ont été menées loyalement par l’employeur, afin de pouvoir, le cas échéant, formuler des objections et contrepropositions.

Schématiquement, trois aspects intéressent les élus :

1.L’employeur a-t-il cherché correctement les postes disponibles ?

Il est vrai qu’il suffit à l’employeur de proposer un emploi pour que son obligation de reclassement soit satisfaite. On ne peut donc lui reprocher de ne pas avoir proposé l’ensemble des postes disponibles en France et en Navarre s’il propose un emploi correspondant préconisations du médecin du travail, dans le même établissement, et n’impliquant pas de perte de salaire. Toutefois, le CSE aura intérêt à creuser la question lorsque les propositions de l’employeur imposeraient toutes d’importants sacrifices au salarié, typiquement, s’il ne lui propose que des postes situés à une heure de route, ou payés deux fois moins.

Autre cas de figure, l’absence de poste disponible : même si aucun reclassement n’est possible, car aucun poste ne serait vacant, l’employeur doit consulter le CSE. L’absence de toute solution pour recaser le salarié pourra légitimement interroger les élus, surtout si l’employeur appartient à un groupe multinational se plaignant du manque de main d’œuvre.

Dans ces situations, les élus pourront demander à l’employeur la manière dont il a mené ses recherches (ses interlocuteurs, la manière dont il s’est adressé au reste du groupe…). Certains élus n’hésitent pas à faire leurs propres recherches, notamment dans les bourses d’emplois de l’entreprise ou dans les annonces publiées sur Pôle Emploi France Travail, à la recherche de postes plus adéquats qui n’auraient pas été proposés. Ils peuvent également interroger l’employeur sur les adaptations de poste ou les formations qui permettraient de reclasser leur collègue et auxquelles l’employeur n’aurait pas pensées.

2. Quelles sont les implications des postes proposés sur le contrat du salarié ?

Nécessairement, l’inaptitude suppose que le salarié ne peut plus occuper son emploi. La conséquence directe est que les fonctions prévues à son contrat vont être modifiées. Tous les postes n’impliqueront pas le même degré de changements, certains se contenteront d’un passage sur un poste moins contraignants sur le plan physique, quand d’autres diminueront sa rémunération par trois et l’enverront à l’autre bout de la France.

L’opportunité s’appréciera au cas par cas. Il est vrai qu’un salarié inapte au travail de nuit risque de perdre les compensations liées à ce mode d’organisation s’il est reclassé sur un poste de jour, ce qui n’est pas forcément illogique. Dans d’autres cas, le CSE pourra s’étonner qu’on ne propose que des postes situés sur un autre site, alors qu’un poste conforme aux préconisations du médecin du travail existant sur le lieu d’affectation du salarié, moyennant une légère mise-à-niveau.

Le CSE peut donc interroger l’employeur sur les postes proposés, notamment leur coefficient, leur classification, les fonctions afférentes, la rémunération, le lieu de travail, leurs contraintes… L’idée étant de savoir ce qu’implique le reclassement du salarié.

3. Les postes proposés sont-ils compatibles avec les préconisations du médecin du travail ?

C’est quand même le point essentiel. Le médecin du travail accompagne généralement ses avis de préconisations : affectation du salarié sur un poste de bureau, fin du travail de nuit, poste sans contrainte de manutention d’objets de plus de dix kilos, plus de conduite, plus de contact avec le patron…

Le CSE devra alors s’intéresser à deux points : est-ce que les postes proposés respectent bien les contraintes imposées par le médecin du travail (déjà entendu du DRH à propos d’un salarié interdit du port de charges lourdes : « il n’aura qu’à porter des packs d’eau, même ma grand-mère le fait et elle habite au cinquième sans ascenseur… »), et, si l’employeur estime qu’aucun poste ne peut répondre aux préconisations médicales, vérifier si, réellement, aucun des aménagements préconisés ne peuvent être mis en œuvre (déjà entendu d’au autre DRH, « il est aussi dur de trouver une sourie ergonomique qu’une PS5 »). Il est vrai que certains avis ne facilitent pas le reclassement (« privilégier le télétravail » à propos d’un emploi manutentionnaire, éviter la conduite pour un chauffeur…). Dans ce cas, il faudra vérifier si le salarié dispose des compétences pour occuper d’autres postes, ou pourrait les acquérir par le biais d’une formation courte.

Les élus devront ainsi vérifier le fragile équilibre entre mise en œuvre de toutes les adaptations nécessaires et protection de la santé du salarié.

Quel impact pour l’avis du CSE ?

Même si l’employeur pourra passer outre l’avis du CSE, comme souvent, en matière d’inaptitude, les élus ont une double possibilité de savonner la planche de l’employeur, ce qui peut avoir des conséquences concrètes lorsque le salarié inapte l’attaquera aux prud’hommes.

Cas n°1 : la consultation n’a pas été menée correctement. La Cour d’appel de Toulouse nous en a donné un exemple récent dans un cas où l’employeur de bien répondre aux questions du CSE. En l’occurrence, les coefficients et les fiches des postes proposés au reclassement n’avaient pas été communiqués au CSE, ce qui avait empêché celui-ci de se prononcer de façon éclairée sur l’adéquation des propositions de reclassement avec les compétences de la salariée et les préconisations du médecin du travail. Ce défaut de consultation rend le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, quand bien même le reclassement aurait été fait correctement. De quoi réfléchir (les références, au cas où : CA Toulouse, RG 23/02796, 16 mai 2025).

Cas n°2 : le reclassement a été mal fait. La recherche loyale de reclassement est une condition essentielle de la validité d’un licenciement pour inaptitude. Si l’avis du CSE ne lie pas le juge, il peut l’éclairer sur les manières dont l’employeur a procédé, et porter à son attention sur ce qu’il a pu oublier. Bien rédiger l’avis peut donc aider le salarié dans sa contestation prud’homale en mettant en avant les carences dans les recherches de reclassement. Toute la difficulté est que l'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi correspondant aux préconisations du médecin du travail. L’avis devra mettre en relief que le poste proposé par l’employeur est en contradiction avec les limites fixées par le médecin, ou qu’un poste plus adaptés existe dans l’entreprise.

Autre hypothèse : l’employeur n’a proposé aucun poste. Il appartiendra au CSE de signaler les postes compatibles avec l’état de santé du salarié qui n’ont pas été proposés, ou les adaptations qui auraient pu être mises en place par l’employeur.

Quoi qu’il en soit, un simple avis négatif ne suffit pas, il faut l’argumenter soigneusement.

Bien entendu, il est aussi possible que le CSE conclue que les recherches de reclassement ont été correctement menées et que le licenciement du salarié était inéluctable. Dans ce cas, il peut rendre un avis favorable.

Peut-on parler de l’origine de l’inaptitude dans l’avis ?

Ce n’est pas l’objet de la consultation du CSE, mais cela le concerne si l’inaptitude est liée à un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité (type burn-out), ou à un accident du travail. Les élus peuvent notamment solliciter une enquête, en utilisant leur droit d’alerte, mais également signaler dans leur avis les problèmes internes à l’entreprise à l’origine de la dégradation de l’état de santé du salarié licencié. Si cela ne remet en cause ni l’inaptitude, ni le reclassement, ces précisions peuvent également aider le salarié dans son éventuel recours contre l’employeur. En effet, si l’inaptitude est liée à une faute de l’employeur, ce lien de cause à effet peut rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ouvrir droit à indemnisation pour le salarié.

A force de voir les condamnations se multiplier, l’employeur finira peut-être par amender ses pratiques.

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