Le contrat peut parfois contenant une clause prévoyant une proratisation de la rémunération variable en fonction des périodes de suspension du contrat de travail. Conséquence directe, les salariées revenant de congés maternité peuvent voir une partie de leur bonus être amputé, et ce même si elles ont rempli tous leurs objectifs. Un situation légitimement agaçante.
Le principe posé par la Cour de cassation est que la part variable s'acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l'entreprise au cours de l'exercice (Chambre sociale, 26 juin 2024, n°23-10.634). C’est notamment grâce à cette règle que les salariés quittant l’entreprise en cours d’exercice bénéficient tout de même d’une partie de leur variable. Mais c’est également en application de ce principe, une salariée en congé maternité ou un salarié en congé paternité peuvent voir leur rémunération variable être réduite au prorata de leur temps d’absence.
La rédaction du contrat est néanmoins essentielle, puisque c’est généralement elle qui prévoit que, en cas d’année incomplète, le ou la salariée ne percevra qu’une partie de son variable. Le vrai problème avec ces règles vient des conséquences que la Cour de cassation en déduit. En effet lorsque la rémunération variable est proratisée en fonction du temps de présence du salarié sur l’année, le fait que les objectifs fixés aient été atteints n’a aucune incidence (Chambre Sociale, 9 février 2022 n°20-12.611).
La situation peut parfois agacer, car il arrive que l’employeur n’adapte pas les objectifs pour tenir compte du fait qu’une année n’a pas été complétement réalisée. Si la salarié parvient néanmoins à les remplir, cela signifie qu’il a effectué le travail d’une année sur une période en réalité plus courte. Charbonner deux fois plus n’est cependant pas récompensé par la Cour de cassation.
Une grande partie des difficultés vient de la rédaction de la clause du contrat relative à la rémunération et aux objectifs. Si celle-ci prévoit une proratisation de la part variable en fonction des absences, la rémunération est supposée être liée à un travail effectif, ce qui autorise l'employeur à la réduire lorsqu'un salarié est en arrêt, même pour raison de santé. Le principe semble contestable lorsque l'on pense que la rémunération variable est avant tout liée à l'atteinte d'objectifs, mais également à l'interdiction des discriminations liées à l'état de santé et à la maternité. C'est pourtant la position des juridictions. Un moyen de contourner la difficulté consiste donc à s'assurer qu'aucune mention liée à la présence effective du, ou de la, salariée ne figure dans la clause, pour que, sur le plan contractuel, le bonus soit uniquement lié aux résultats sans autres conditions. En pratique, on sait bien que cela n'est pas évident, les mentions relatives à la proratisation faisant partie des clauses types insérées dans les modèles de contrats, modèles que les salariés n'ont pas toujours la possibilité d'amender au moment de leur embauche. |
Enfin, pas toujours. Légalement, aucun texte n’impose à l’employeur de maintenir la rémunération des salariées durant un congé maternité. Celles-ci perçoivent en théorie uniquement des indemnités versées par la sécurité sociale. En pratique, de nombreuses conventions collectives sont là pour pallier cet oubli et imposent à l’employeur de compléter les indemnités versées par la Sécu.
C’est sur ce point qu’il est possible d’agir.
La Cour de cassation considère en effet que la rémunération variable doit être prise en compte lorsque la convention collective impose un maintien intégral de la rémunération du salaire de l’employée absente. Elle a même jugé que, si la convention n’exclut pas la part variable, celle-ci doit être intégrée dans le maintien de rémunération (arrêt du 25 novembre 2020, n°19-12.665).
Concrètement, la prime de résultat peut être proratisée, mais le complément de salaire que verse l’employeur durant le congé maternité doit permettre à la salariée de toucher 100% de sa rémunération, variable inclus, si celle-ci comprend au moins un an d’ancienneté. La méthode de calcul de la part variable de référence n’est pas précisée, mais il convient selon moi de prendre en référence la part variable de l’année précédente.
Il faut donc aller consulter la convention collective applicable, pour vérifier si elle prévoit un maintien de salaire, ses conditions (notamment en termes d’ancienneté) et si elle évoque ou non la rémunération variable. Si elle l’inclut expressément, ou qu’elle n’en parle pas, l’employeur doit l’intégrer au calcul du complément de salaires, ce qui permet de compenser la proratisation des objectifs. Pour certaines conventions, et notamment la convention SYNTEC, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de rappeler que le maintien de salaire ne se limitait pas au salaire de base.
Une solution qui, si elle n’est pas totalement satisfaisante, permet au moins de compenser la proratisation du bonus.
"Je vois son noyau. Par contre, pour son livret jeune..."
La situation peut entrainer une double peine. Non seulement la salariée voit son bonus être amputé, mais si en plus elle n’atteint pas ses objectifs, le montant proratisé sera une seconde fois proratisé en raison de son absence (légitime) de résultat.
Heureusement, selon la Cour de cassation, les objectifs fixés doivent être réalistes, et l’employeur doit le démontrer (arrêt du 15 décembre 2021, n°19-20.978). Dans le cas d’une salariée absente quatre mois et à laquelle il serait reproché de ne pas avoir rempli des objectifs fixés pour une année, il y a peu de chance que les objectifs soient qualifiés de réalistes…
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